Broder son trousseau - Présentation
Il y a bien des années de cela, à l'école primaire. Une petite fille apprend le point de croix. Et je peux vous dire une chose : cette petite fille ne comprend rien de ce que l'institutrice lui raconte. D'abord, il faut compter les points (COMPTER ! QUELLE HORREUR !!! ) Ensuite, il faut aller dans un sens, puis dans l'autre - et ce n'est jamais dans le bon sens, à la fin. Non mais c'est quoi, ce truc pour débiles ???!!! Fin de la classe de travaux manuels.
Quelques mois plus tard, au bord du Lac de Saint Cassien (Callian, Provence). La même petite fille, qui commence à trouver le temps long entre la plongée libre, la chasse aux carpes et les coups de soleil. Sous un parasol planté dans les galets, une dame encombrée d'un énorme tapis sur les genoux et armée d'une minuscule aiguille. À y regarder de plus près, stupéfaction : la dame a tout l'air de faire du point de croix ! La petite fille s'approche, pour voir ce qui se passe. Il faut dire qu'elle est sacrément curieuse, pour son âge. Ça turbine à toute vitesse dans le petit crâne de la gamine : « Mais non, mais non, ce n'est pas un 'rrot minet ! C'est du point de... euh ? » Hého ! Ça ressemble pas DU TOUT à ce qu'expliquait l'institutrice. D'abord, c'est BEAU à tomber à la renverse. Ensuite, ce tapis-là, il est ÉNORME !!! Combien de SIÈCLES il va falloir pour tout recouvrir de fil ??? La dame lève un moment la tête et observe la petite fille par dessous ses lunettes. Elle sourit et dit : « C'est de la tapisserie au point (prononcer poingggg, à la provençale), ma pitchounette ». Et là, c'est rapé. Le virus est passé. Il a suffi de deux secondes, la petite fille est restée cinq minutes à baver devant la scène mythologique. Puis la maman est venue la rechercher par la peau du cou et la dame les a regardées s'éloigner en souriant d'un air triste.
Retour à l'époque actuelle, plus d'école et plus de petite fille. Grâce à Dollfuss-Mieg & Cie, à Thérèse de Dillmont et à Porthault Paris, la petite Lisette a compris ce que disait l'institutrice autrefois. Elle repense souvent à la dame du lac et elle lui dit toujours merci en silence. Merci de lui avoir laissé voir sa « tapisserie au poingggg » et de lui avoir refilé le virus.
Broder, c'est sans doute « l'ouvrage pour dames » le plus fascinant et le plus difficile qui soit. Enfin, quand je dis « ouvrage pour dames », c'est une façon de parler. Les meilleurs artisans brodeurs étaient des hommes. Et ce n'est pas parce que beaucoup de dames aiment broder que les hommes ne peuvent pas s'y mettre aussi. Faut pas être sectaire.
Alors voilà, contrairement à ce que la photo de ce billet laisse supposer, je me suis mise à la broderie traditionnelle vers 1990. C'est seulement « pour voir » que j'ai testé le point de croix. Je me suis dit : ça doit pas être sorcier, au fond. J'ai cherché un modèle et je suis tombée sur un motif de « Delft » dans un magazine. Est-ce du Delft ou non, je n'en sais rien. Une chose est sûre : je n'ai pas choisi la facilité. J'ai commencé le travail sur une nappe de 180 x 120 avec des motifs en 5,5 points au centimètre. Ça m'occupe depuis 2006... en alternance avec d'autres choses, bien entendu ! Et pas que de la broderie. Je couds aussi.
Mais enfin, bon. Broder c'est très important pour moi. Ça m'a appris la patience. Ça m'a appris à compter (ce n'était pas du luxe, dans mon cas). Ça m'a donné l'occasion de faire plaisir à des tas de gens. Et surtout, surtout, c'est une vraie école de vie.
Je vais essayer de faire passer le peu que je sais dans Abracad'Argent. Ça ne rapporte pas beaucoup, en tout cas pas des sous. Mais pour le reste, c'est vraiment magique.
Bonne contamination !
Wonder Lisette
Quelques mois plus tard, au bord du Lac de Saint Cassien (Callian, Provence). La même petite fille, qui commence à trouver le temps long entre la plongée libre, la chasse aux carpes et les coups de soleil. Sous un parasol planté dans les galets, une dame encombrée d'un énorme tapis sur les genoux et armée d'une minuscule aiguille. À y regarder de plus près, stupéfaction : la dame a tout l'air de faire du point de croix ! La petite fille s'approche, pour voir ce qui se passe. Il faut dire qu'elle est sacrément curieuse, pour son âge. Ça turbine à toute vitesse dans le petit crâne de la gamine : « Mais non, mais non, ce n'est pas un 'rrot minet ! C'est du point de... euh ? » Hého ! Ça ressemble pas DU TOUT à ce qu'expliquait l'institutrice. D'abord, c'est BEAU à tomber à la renverse. Ensuite, ce tapis-là, il est ÉNORME !!! Combien de SIÈCLES il va falloir pour tout recouvrir de fil ??? La dame lève un moment la tête et observe la petite fille par dessous ses lunettes. Elle sourit et dit : « C'est de la tapisserie au point (prononcer poingggg, à la provençale), ma pitchounette ». Et là, c'est rapé. Le virus est passé. Il a suffi de deux secondes, la petite fille est restée cinq minutes à baver devant la scène mythologique. Puis la maman est venue la rechercher par la peau du cou et la dame les a regardées s'éloigner en souriant d'un air triste.
Retour à l'époque actuelle, plus d'école et plus de petite fille. Grâce à Dollfuss-Mieg & Cie, à Thérèse de Dillmont et à Porthault Paris, la petite Lisette a compris ce que disait l'institutrice autrefois. Elle repense souvent à la dame du lac et elle lui dit toujours merci en silence. Merci de lui avoir laissé voir sa « tapisserie au poingggg » et de lui avoir refilé le virus.
Broder, c'est sans doute « l'ouvrage pour dames » le plus fascinant et le plus difficile qui soit. Enfin, quand je dis « ouvrage pour dames », c'est une façon de parler. Les meilleurs artisans brodeurs étaient des hommes. Et ce n'est pas parce que beaucoup de dames aiment broder que les hommes ne peuvent pas s'y mettre aussi. Faut pas être sectaire.
Alors voilà, contrairement à ce que la photo de ce billet laisse supposer, je me suis mise à la broderie traditionnelle vers 1990. C'est seulement « pour voir » que j'ai testé le point de croix. Je me suis dit : ça doit pas être sorcier, au fond. J'ai cherché un modèle et je suis tombée sur un motif de « Delft » dans un magazine. Est-ce du Delft ou non, je n'en sais rien. Une chose est sûre : je n'ai pas choisi la facilité. J'ai commencé le travail sur une nappe de 180 x 120 avec des motifs en 5,5 points au centimètre. Ça m'occupe depuis 2006... en alternance avec d'autres choses, bien entendu ! Et pas que de la broderie. Je couds aussi.
Mais enfin, bon. Broder c'est très important pour moi. Ça m'a appris la patience. Ça m'a appris à compter (ce n'était pas du luxe, dans mon cas). Ça m'a donné l'occasion de faire plaisir à des tas de gens. Et surtout, surtout, c'est une vraie école de vie.
Je vais essayer de faire passer le peu que je sais dans Abracad'Argent. Ça ne rapporte pas beaucoup, en tout cas pas des sous. Mais pour le reste, c'est vraiment magique.
Bonne contamination !
Wonder Lisette