Gérer son budget - Savez-vous planter les sous ? 1. L'épargne

Publié le par Wonder Lisette

Bon, fini de broder... Hop ! Au boulot ! Nous en étions donc restés à l'art de la limite. Je précise, suite au commentaire de Petite Soeur, que l'article sur les limites est uniquement destiné à celles et à ceux qui ont de la marge. Ben oui, c'est une évidence ! 

Il est bon que je le répète : Abracad'Argent n'a pas pour but de culpabiliser les budgets trop serrés mais plutôt de remettre dans l'axe les budgets trop négligés. Nuance.

Enfin voilà. Maintenant qu'on a vu qu'il faut connaître ses limites pour pouvoir garder ses sous, il est temps de savoir ce qu'on fait avec les sous qu'on a gardés. C'est logique...

L'épargne :

Le premier réflexe chez le belge moyen qui a des sous, c'est de les mettre à la banque. Ça, tous les banquiers vous le diront (en se frottant les mains ). Un petit dessin de notre Kroll national illustre parfaitement la situation :


Le principe est simple : en échange des sous qu'on dépose à la banque, on obtient deux choses.

1. La « certitude » que les sous sont à l'abri.
2. Des intérêts (= un pourcentage du montant placé).

Vu comme ça, le procédé n'a que des avantages. Mais hé, ho ! Minute papillon... Il y a quand même des inconvénients aussi.

Les frais bancaires :

D'abord, il y a des frais pour le client qui dépose ses sous. « Des frais ?! », que vous allez couiner. Ben oui, des frais.

C'est bien vu de la part de la banque. Comme elle « travaille » avec les sous du client, la banque considère que c'est le client qui doit payer les frais (puisque c'est lui qui profite des intérêts). J'en vois qui froncent les sourcils en se préparant à couiner : « ben c'est pas logique leur truc ! S'ils font des sous avec les sous du client, ce serait normal que le client ne paie rien. Ils n'ont qu'à donner moins d'intérêts alors ! » Oui, en théorie.

Seulement voilà : le taux d'intérêt créditeur (= qui permet de calculer les intérêts que reçoivent les clients qui ont placé leurs sous) est de 1 % pour le moment. Difficile dans ces conditions de baisser encore le taux. Surtout que la plupart des clients n'ont pas des sommes énormes sur leur compte d'épargne (sauf quelques veinards pleins aux as). Et puis les frais c'est surtout pour les petits comptes. Plus on a de sous, moins on paie de frais (voire, plus du tout). Ouais, il se pourrait bien qu'on se dise : « cherchez l'erreur ... »

Le précompte mobilier :

En plus des frais bancaires sur l'argent placé, il y a AUSSI des frais sur les intérêts. Ou plutôt, des impôts. L'État ponctionne en effet ce qu'il appelle le « précompte mobilier » sur les revenus du capital. Kézako ? Mettons qu'on ait un compte d'épargne garni de 175.000 €. Au taux d'intérêt de 1 %, on touchera 1.750 € d'intérêts par an.

Seulement voilà, l'État ne l'entend pas de cette oreille. Il faudra que l'épargnant donne 15 % des intérêts qu'il a gagnés pour payer le précompte mobilier. Soit le calcul suivant :

- 15 % de 1.750 € d'intérêts = 262,5 €
- 1.750 € d'intérêts - 262,5 € de précompte mobilier = 1.487,5 € d'intérêts réellement gagnés

Conclusion, le client n'a pas vraiment eu 1 % d'intérêts dans l'histoire. En réalité, les sous qu'il a donnés à la banque ont rapporté 0,85 % d'intérêts. Mais qu'on se rassure : on ne doit en principe payer le précompte mobilier qu'à partir de 1.730 € d'intérêts. En-dessous, c'est gratuit (sauf quelques exceptions) - jusqu'à maintenant, en tout cas...

L'inflation :

Ce n'est pas encore tout. Il y a aussi un truc qui rôde et qui s'appelle l'inflation. Et ce truc, c'est comme les mites dans les armoires : ça bouffe les sous. Comment ça fonctionne ? C'est très simple.

Imaginons qu'on sorte pour aller voir un bon film au cinéma. Quand on arrive au guichet, l'employé (s'il en reste un qui ne soit pas une machine ) annonce fièrement que ça fera 10 €. On paie et on file s'asseoir, après un détour par la case pop-corn.

Maintenant imaginons qu'on ait une machine à remonter le temps et qu'on décide d'aller voir James Bond contre le Docteur No en... 1963 ! Combien ça coûterait ? Moins de 40 francs belges (c'est-à-dire moins de 1 €).

Pourquoi ? Parce que « tout augmente ». Dit autrement : l'argent ne cesse pas de perdre de la valeur d'une année à l'autre. C'est le principe de l'inflation. Il y a dix ans, 250 € c'était déjà une somme. De nos jours, on peut déjà dépenser ce montant rien qu'en faisant de grosses courses dans un supermarché.

Depuis que les autorités financières font en partie la loi (via notamment le « taux directeur » de la Banque Centrale Européenne), on peut considérer que l'inflation est d'environ 2 % par an. Sauf cas exceptionnel (voir l'année 2009), c'est la perte de valeur que l'argent « immobile » subit d'une année à l'autre.

Conséquence ? L'argent qu'on place à la banque perd de sa valeur d'une année à l'autre. Il y a 45 ans, un million de francs belges permettaient de s'offrir un manoir. De nos jours, avec 25.000 €, on a juste de quoi s'acheter une voiture familiale mono-volume version essence -  et encore, sans les options.

Ce qui signifie que laisser des sous sur un compte d'épargne à du 1 % d'intérêts quand l'inflation est de 2 % et le précompte mobilier de 15 %, ça revient à dire aux mites : « Coucou les filles ! Bon miam-miam en pur double-fil lambswool dans mon petit bas de laine YOUHOUUUUU ! »  Pour ensuite regarder passivement ces saletés d'insectes s'offrir un festin gratuit. Vous serez d'accord : ce n'est pas très raisonnable.

Le risque systémique :

Vous croyez que c'est ENFIN tout ? Que nenni ! Il reste encore un point négatif à considérer. Le « risque systémique » n'a rien à voir avec l'informatique. Le « risque systémique », c'est quand une banque a fait des bêtises et que ça prend des proportions monumentales.

Il faut savoir qu'avec l'argent des clients, la banque va pouvoir travailler de différentes façons. Elle peut par exemple prêter l'argent à des entreprises qui en ont besoin pour s'agrandir. Elle peut prêter l'argent à des clients qui veulent acheter une maison, une voiture ou des vacances de rêve à Cuba. Elle peut aussi prêter l'argent à des États qui lui donnent des « obligations » ou des « bons du trésor » en échange. Elle peut prêter l'argent à une autre banque. Elle peut acheter des actions en bourse. Ou une combinaison de tout ça à la fois. En fait, une banque, c'est vachement compliqué de nos jours.

Comme c'est une banque, l'argent rentre et il sort continuellement de ses caisses. Il ne faut pas avoir la naïveté de croire que la banque a forcément tout l'argent qu'elle fait travailler. Pour acheter et vendre en bourse, par exemple, il n'est pas nécessaire d'avoir la totalité des sous. La banque peut aussi acheter en bourse à crédit ! Oui, comme pour les vacances de rêve à Cuba (sauf que dans le cas des banques en bourse, on parle de millions d'euros !!!)

La conséquence ? C'est que si la banque a eu les yeux plus grands que le ventre, tout le monde se retrouve dans la mélasse. La banque elle-même, en premier lieu. Mais aussi les États à qui la banque veut refiler d'urgence leurs obligations et leurs bons du trésor pour récupérer ses sous. Et les autres banques qui ont prêté du fric et ne voient plus rien venir. Et les opérateurs boursiers qui ont acheté à crédit pour la banque et qui voudraient bien qu'on les paie immédiatement, de peur de ne jamais retrouver leur pognon.

Et les clients de la banque aussi, bien entendu. Prenons le client de tout à l'heure. Le gars a 175.000 € placés sur son compte d'épargne, dans la banque qui a foiré son coup. Il a un fameux souci à se faire, le pauvre gars !  Il n'est pas dit que la banque va lui rendre ses sous, puisqu'elle les a déjà dépensés ailleurs pour boucher les trous qu'elle a creusés ! En fait, rien ne peut obliger la banque à rendre les sous qu'on lui a donnés...




Pour le client belge qui a un compte d'épargne, il y a quand même le système de « garantie des dépôts ». En principe, ça permet de récupérer maximum 100.000 € en cas de faillite de la banque. Et c'est l'État qui paie. Je dis bien en principe, parce que si le cas se présentait pour toutes les banques en même temps, aucun État n'aurait les reins assez solides pour tenir le choc...

« Ben merde alors ! » , que vous allez couiner. « Ça voudrait dire que je ne dois pas épargner ?! C'était quoi, toute cette histoire de dépenses d'épargne, hein ?! » , qu'ils vont rouspéter, les couineurs.

ZEN ! L'épargne est in-dis-pen-sa-ble. En tout cas, jusqu'à un certain point. Mais dès qu'on a rempli son enveloppe « c'est vraiment trop injuste », il est temps de se mettre à réfléchir à d'autres moyens de planter ses sous. Dans le prochain article, on va parler investissement et aller faire un petit tour du côté des produits bancaires.

Wonder Lisette.


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